Il s’agit de projets industriels sur des sites classés, donc des projets générateurs de risques. A ce titre, leur exploitation est soumise à une autorisation d’exploitation, accordée par l’Etat. En l’espèce, j’évoque le projet de la société SFDM pour développer l’activité du site de stockage d’hydrocarbures de la Ferté Alais, avec la construction d’un quai de chargement dans le parc de citernes de Cerny. J’évoque aussi le projet du bâtiment C de la ZAC des Haies Blanches, au Coudray Montceaux, un site classé lui aussi car cet énorme volume de stockage peut bruler ou exploser et exposer son voisinage à des effets assez néfastes.
Dans les deux cas, les riverains attendent l’énqûête publique pour savoir “à quelle sauce ils seront manger”, les plus actifs exprimeront leur opposition sur un registre d’observation tenu par un commissaire enquêteur nommé par le préfet, puis le préfet tranchera après avoir reçu un rapport de ce commissaire enquêteur mais sans qu’on sache très bien s’il l’a au moins ouvert.
En réalité, tout est prévu pour que cela ne fonctionne pas du tout comme cela. Et c’est la convention d’Aarhus qui a tout changé.
Cette convention d’Aarhus a éveillé ma curiosité car je l’ai entendue être citée dans chacune des unités territoriales de la DRIEE (Direction Régionale et Interdépartementale de l’Environnement et de l’Energie) que j’ai visitée pour lire des études de danger analogues à celle que SFDM est en train de rédiger à propos de son projet à Cerny. J’ai trouvé une belle explication sur cette convention sur le site de l’IRSN, dans l’onglet “nucléaire et société” et en cliquant sur le mot clé “convention d’Aarhus“.
C’est grace à cette convention que j’ai pu accéder aux 3 études de danger des dépôts de stockage et de distribution d’hydrocarbures de Grigny (91, DRIEE de Lisses), de Mitry-Mory (77, DRIEE de Savigny le Temple) et de Coignières (78, DRIEE de Versailles). Non seulement j’a pu y accéder, mais cela a été facile et j’ai été à chaque fois bien accueilli par les directeurs ou leurs collaborateurs pour qui j’étais là non pas seulement pour exercer un droit, mais réaliser le mandat d’un élu local.
Mais cela va encore plus loin, et c’est le dossier de la ZAC des Haies Blanches qui me l’a fait découvrir.
Pour obtenir une autorisation d’exploitation d’un site classé, l’industriel doit fournir un dossier comportant une étude d’impact et une étude de danger. Ce dossier est examiné par la DRIEE qui autorise la suite de la procédure par un avis favorable, ou qui bloque la procédure par un avis négatif.
Cet avis ne porte pas sur la substance du projet, mais sur la complétude du dossier!
Ainsi, la procédure des Haies Blanches est à l’étape “enquête publique”, enquête publique prescrite par le préfet sur un avis favorable de la DRIEE. L’avis favorable de la DRIEE ne porte pas sur la compatibilité du projet avec son voisinage, ni même sa conformité avec toutes les prescriptions réglementaires, mais seulement sur le contenu du dossier soumis à l’enquête publique et qu’elle juge apte à bien informer le public.
Et ce n’est pas fini!
Dans des projets comme ceux de SFDM à Cerny ou de Panhard à la ZAC des Haies Blanches, il y a un volet routier. Les deux projets n’ont du sens que par la route, à cause des mouvements de camions qui vont transporter les produits stockés dans ces deux sites. Pourtant, la DRIEE n’émet aucun avis sur la complétude du dossier d’enquête publique à l’égard de ce volet routier! Elle n’est pas compétente au delà de l’accès routier au site.
Et, toujours plus loin:
La seule autorité compétente pour se saisir du volet routier de ces dossiers sont les communes qui, avec leur compétence urbanisme, rédigent un PLU (Plan Local d’Urbanisme) en suivant les prescriptions d’un document élargi au territoire intercommunal, le SCOT (Schéma de Cohérence Territoriale) rédigé avec les communes voisines, SCOT qui contient un PLD (Plan Local de Déplacement).
Pour les deux projets, le SCOT de la CCVE et le PLU de Mennecy sont incompatibles avec l’activité prévue, car la route RD191, de Ballancourt à l’A6, est devenue une voie de desserte locale et n’autorise pas l’organisation d’une activité de transit routier. La commune de Mennecy a déjà manifesté son opposition au projet de SFDM en adoptant une délibération hostile en conseil municipal. Ce sera fait le 27 avril pour la ZAC des Haies Blanches. La CCVE a adopté la même délibération à l’égard du projet SFDM et a même exercé un recours au tribunal administratif motivé, entre autres, par l’incompatibilité du projet avec le SCOT.
Ne pas le faire serait une faute pour les élus, qui auraient alors manqué à l’une de leurs missions.
Mais remarquons aussi que les services de la préfecture travaillent d’une façon indigne pour notre société. La convention d’Aarhus est transcrite en droit européen et en droit français. Elle donne le droit au public de s’informer sur ces dossiers mais, surtout, elle impose à l’administration de faire participer le public aux prises de décision. Pour les dossiers SFDM et Haies Blanches, la préfecture a tenu à l’écart toutes les communes impactées par le volet routier des deux projets. C’est malhonnête!